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Le Made in France technologique au service de notre souveraineté numérique

Le Made in France technologique au service de notre souveraineté numérique

Par Jennifer Montérémal

Mis à jour le 20 décembre 2022, publié initialement le 16 novembre 2020

Comment asseoir notre souveraineté numérique face aux géants américains, mais aussi chinois ?

Aujourd’hui, nous dépendons plus que jamais des nouvelles technologies.

Pourtant, les solutions étrangères demeurent prépondérantes, tant dans les achats des entreprises que dans les marchés publics.

Toutefois, le plan de relance annoncé par le Gouvernement révèle une prise de conscience de l’importance du numérique pour la santé de notre économie. Dans ce contexte Frédéric Mazzella, Président-Fondateur de BlaBlaCar, et également Président entrepreneur de France Digitale, revient sur l’importance du Made in France technologique.

Quel constat dressez-vous sur la situation de la souveraineté numérique en Europe ?

Frédéric Mazzella :

En matière de souveraineté numérique, la France et l’Europe accusent un retard par rapport aux États-Unis, mais aussi par rapport à la Chine. En ce sens, le récent confinement lié à la crise sanitaire de la Covid-19 a révélé plusieurs choses.

Tout d’abord, la transformation numérique de notre économie doit être accélérée. L’explosion du digital avec le confinement a mis en évidence notre retard : le télétravail (forcé !) a été multiplié par dix, l’e-commerce par deux. Pourtant, la digitalisation des activités permet de rendre les entreprises, et donc l’ensemble de notre tissu économique, plus productif et compétitif. Nos TPE et PME gagneront donc à avoir davantage ce réflexe d’optimisation numérique. Pour les aider, avec France Digitale, nous avons constitué un kit du e-commerce recensant les solutions digitales Made In France qui permettent de digitaliser son commerce.

Par ailleurs, nous avons davantage pris conscience de notre forte dépendance aux solutions étrangères, particulièrement américaines, alors qu’il existe de nombreux outils français performants.

Enfin, nous avons vu que le secteur du numérique est un fort vivier d’emploi ! Pendant le confinement, plus de 3000 offres d’emploi ont été publiées par des startups via notre initiative «Confinés mais recrutés», et 94 % des postes en startup sont en CDI. Relancer notre économie passera par ces métiers du numérique.

Le volet numérique du plan de relance, justement, constitue-t-il une avancée encourageante ?

Frédéric Mazzella :

De nombreuses initiatives en faveur du numérique ont vu le jour durant ce quinquennat. Les entreprises du digital ont pu bénéficier d’initiatives de soutien, à l’image du Next40 dont le but est de faire émerger de nouveaux champions technologiques français, les licornes, comme BlaBlaCar, Doctolib, OVH, etc.

Avec le plan de relance présenté le 3 septembre, ce sont 7 milliards d’euros sur les 100 prévus au total qui seront alloués aux acteurs du numérique. C’est un soutien encourageant, qui témoigne de l’importance du numérique dans le monde de demain ; rappelons que le numérique est le premier secteur créateur d’emplois net en 2019 et le sera fort probablement en 2020 également.

Toutefois, sur ces 7 milliards, 2,6 seront consacrés à des secteurs considérés comme stratégiques, à l’instar de la cybersécurité, du cloud ou encore de la santé. Or, si nous prenons l’exemple de nos voisins allemands, ce sont quelques 5 milliards qu’ils comptent investir pour le seul domaine de l’intelligence artificielle.

Nous pouvons donc aller encore plus loin et continuer à diffuser le message suivant : le numérique est un levier puissant sur lequel notre économie doit s’appuyer pour se relancer et relever les défis écologiques et sociaux à venir.

Comment améliorer la situation d’après vous ?

Frédéric Mazzella :

Après les annonces, il faut passer concrètement à l’action. Comment les mesures annoncées seront-elles appliquées ? Dans quels délais ? Quelles seront les entreprises qui en bénéficieront ?

Il faut garder à l’esprit que ce sont les contrats qui font vivre les entreprises, et pas les subventions puisqu’un contrat, en plus d’apporter de l’argent à l'entreprise, lui apporte un client qui va l'aider à améliorer son produit. Il est donc important qu’un maximum de contrats de produits ou services numériques soient remportés par des entreprises françaises, que ce soit pour les achats des entreprises ou les marchés publics. À ce titre, les marchés publics doivent davantage s’orienter vers des solutions nationales, afin de faire valoir le Made in France technologique au même titre que le Made in France industriel. Il en va, nous l’avons vu, de la relance de notre économie, mais aussi de notre souveraineté numérique au regard des enjeux actuels, notamment en matière de protection des données.

Les fonds privés doivent aussi suivre cette dynamique, bien sûr, sans quoi cela se révèlera insuffisant. La sphère publique n’est pas la seule à avoir un rôle à jouer, et il reviendra aux investisseurs privés de faire effet de levier.

Avez-vous des exemples d’initiatives prises à l’étranger en ce sens ?

Frédéric Mazzella :

Sur la question des marchés publics, nous pouvons citer la DARPA (Defense Advanced Research Projects Agency). En charge de la recherche et du développement, et reliée au département de la Défense des États-Unis, elle effectue ses commandes uniquement auprès d’acteurs américains. Autre exemple : la mise en place de la loi Buy American Act qui, depuis des décennies, permet aux entreprises nationales de bénéficier des commandes publiques. Enfin, il y a aussi le cas de la Chine, qui s’est dotée d’une politique forte pour éviter que les entreprises étrangères ne rentrent dans leurs marchés publics.

En un mot, l’Europe doit réfléchir, autant à l’échelle politique qu’au niveau de ses acteurs privés, à la manière de soutenir et de valoriser ses entreprises numériques. Cette prise de conscience, mais également le déploiement d’actions concrètes, sont seules garantes de notre souveraineté numérique.

Formé à Normale Sup, Stanford et l'INSEAD, Frédéric Mazzella est le président et fondateur de BlaBlaCar.

Il est également coprésident de l’association France Digitale. Fondée en 2012, France Digitale est la plus grande association de startups en Europe, avec plus de 1800 startups et investisseurs français du numérique. L’association se donne pour mission de créer des champions européens du numérique et d’animer l'écosystème des startups en France.

Article invité. Les contributeurs experts sont des auteurs indépendants de la rédaction d’Appvizer. Leurs propos et positions leur sont personnels.

Jennifer Montérémal

Jennifer Montérémal, Editorial Manager, Appvizer

Actuellement Editorial Manager, Jennifer Montérémal a rejoint la team Appvizer en 2019. Depuis, elle met au service de l’entreprise son expertise en rédaction web, en copywriting ainsi qu’en optimisation SEO, avec en ligne de mire la satisfaction de ses lecteurs 😀 !

Médiéviste de formation, Jennifer a quelque peu délaissé les châteaux forts et autres manuscrits pour se découvrir une passion pour le marketing de contenu. Elle a retiré de ses études les compétences attendues d’une bonne copywriter : compréhension et analyse du sujet, restitution de l’information, avec une vraie maîtrise de la plume (sans systématiquement recourir à une certaine IA 🤫).

Une anecdote sur Jennifer ? Elle s’est distinguée chez Appvizer par ses aptitudes en karaoké et sa connaissance sans limites des nanars musicaux 🎤.