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LegalTech : la révolution numérique à la conquête du droit

LegalTech : la révolution numérique à la conquête du droit

Par Samantha Mur

Mis à jour le 9 juillet 2020, publié initialement le 15 avril 2020

Qu’entend-on par LegalTech ?

Alors que le digital s’immisce progressivement dans toutes nos activités et sphères de nos vies, la transition numérique est désormais en train de conquérir le domaine du droit.

Cette entrée de la tech dans l’univers des services et des métiers proposant une expertise juridique vient révolutionner les usages dans les systèmes judiciaires de la planète entière.

Portées par des outils innovants, du big data à l’intelligence artificielle, en passant par le machine learning, nombreuses sont les startups de la révolution numérique qui viennent transformer le paysage du droit. Elles forment ainsi, avec d’autres acteurs économiques, la LegalTech.

Qu’est-ce qu’une legaltech, au juste ? Et comment comprendre l’essor de ce phénomène ?

Voici un tour d’horizon des tendances et des enjeux d’un écosystème riche et de plus en plus dynamique en France :

Qu’est-ce qu’une Legaltech ?

Définition : des outils numériques au service du droit

Le terme Legaltech désigne avant tout une technologie appliquée au domaine juridique (d’après son équivalent anglais : Legal technology), ou plus précisément au service du droit.

Par extension, les legaltech désignent également les entreprises qui offrent des services et des outils numériques contribuant à repenser la pratique du droit, et sont généralement associées aux start-ups qui ont vu le jour dans ce domaine.

Ces jeunes pousses, qui occupent une large part du marché du droit, ont su innover pour repenser les usages traditionnels du droit et y intégrer les plus avancées des nouvelles technologies.

À l’origine, ces entreprises offraient essentiellement des outils spécifiques pour les professionnels du droit, à commencer par les avocats, pour leur gestion des tâches chronophages comme la facturation, le classement de documents ou la comptabilité.

Aujourd’hui, plus largement, l’objectif des acteurs de ce marché est d’utiliser l’innovation numérique pour répondre à tout besoin requérant une compétence juridique, en s’adressant aussi bien aux justiciables, particuliers ou entreprises, qu’aux experts du droit.

Ainsi, ils s’appuient sur le meilleur du progrès technologique, du big data au machine learning, afin de mettre à disposition des documents, des procédures ou des services relevant du domaine du droit, comme :

  • de la documentation juridique numérique en accès libre (à l’image de Legifrance pour la diffusion de données de jurisprudence) ;
  • des démarches juridiques en ligne (accompagnement à l’accomplissement de formalités juridiques, etc.) ;
  • la mise en relation d’experts avec leurs clients (plateformes, annuaires, etc.).

Par exemple, parmi les services juridiques digitalisés les plus répandus, les legaltech proposent la rédaction d’actes, l’accès à l’information juridique, l’aide aux démarches de création d’entreprise, etc.

💡  On parle de « droit augmenté » pour désigner ces pratiques assistées de technologies numériques.

Dans quels domaines se spécialisent les legaltech ?

► Pour les experts du droit (avocats, magistrats, huissiers, notaires, etc.), les legaltech visent à les accompagner dans leur démarche de digitalisation. Elles apportent aux professionnels plus de performance dans l’exercice du droit, en automatisant certaines tâches fastidieuses afin de leur faire gagner du temps et d’augmenter leur productivité. Les outils mis à leur disposition :

  • accélèrent la lecture et l’analyse de décisions de justice,
  • intègrent des algorithmes prédictifs,
  • permettent l’analyse de contrats et de données,
  • facilitent la gestion d’affaires, etc.

► Pour les entreprises, les legaltech offrent des services administratifs et juridiques concernant :

  • la facturation et la comptabilité,
  • le stockage, la génération de documents et la signature électronique à valeur légale,
  • les formalités de création d’entreprise,
  • le recrutement de salariés,
  • la gestion de la paie,
  • le recouvrement de factures impayées,
  • la veille réglementaire, etc.

► Pour les particuliers, les solutions proposées par les legaltech ont pour but d’offrir des réponses simples et rapides aux justiciables pour leur éviter les frais qu’implique le recours à un professionnel du droit. Elles visent à démocratiser le droit et le rendre plus égalitaire notamment grâce à :

  • la mise à disposition de documents juridiques en ligne,
  • la fourniture d’outils permettant d’entreprendre des démarches juridiques sans passer par un avocat,
  • l’optimisation des impôts,
  • des espaces en ligne de mise en relation avec des avocats, etc.

Le point sur les Legaltech en France

La prise d’ampleur dans le monde anglo-saxon, et notamment aux États-Unis est sans précédent et révèle bien que le potentiel de ce secteur est immense :

En 2019, les investissements dans la legaltech américaine ont atteint 1,23 milliard de dollars.

Bloomberglaw.com

Si ces chiffres sont impressionnants, qu’en est-il de la LegalTech en France ?

Situation et French Legal Tech

En France, le marché des outils digitalisé dans la sphère du droit est encore jeune, mais plein de promesses.

Si la montée en puissance des acteurs français est encore quelque peu freinée par des problématiques culturelles et réglementaires, certaines entreprises se démarquent.

En 2019, 5 acteurs majeurs ont fait une levée de fonds conséquente : LegalStart (15 à 20 millions d’euros), LegalPlace (6 millions d’euros), Predictice (5 millions d’euros), Case Law Analytics (2 millions d’euros) et Call A Lawyer (500 000 euros) (source : Les Echos Start).

En France, le secteur a levé plus de 52 millions d’euros en 2019.

Les Echos Start

Les investissements ne cessent de progresser dans ce secteur, et depuis 2016, ils ont connu une hausse de plus de 300 %.

Qui sont les acteurs de cet écosystème ?

On observe qu’il s’agit surtout de jeunes entreprises innovantes : 67 % des acteurs sont des start ups, les autres se répartissent de la manière suivante :

© Village de la Justice (données de mars 2020)

Comment se répartissent les acteurs par domaine ?

Les acteurs de la LegalTech visent massivement le domaine de la rédaction d’actes, qui concerne aussi bien les entreprises que les particuliers.

De même, la mise en relation d’experts du droit avec leurs clients professionnels ou particuliers revêt une importance particulière, puis suivent des domaines plus pointus en matière de technologies avec l’émergence de services novateurs, comme le machine learning, le big data et les robots juridiques, etc. comme détaillé ci-dessous :

© Village de la Justice (données de mars 2020)

Quelles sont les cibles commerciales principales des LegalTech en France ?

D’après les données de mars 2020 de l’Observatoire de la LegalTech, sont essentiellement visés, par ordre d’importance :

  • les entreprises,
  • les avocats,
  • les services juridiques d’entreprises ou de collectivités,
  • le grand public,
  • et, dans une moindre mesure, les notaires, huissiers, experts-comptables, etc.

ℹ️  Qui se cache derrière les fondateurs de ces start-ups ? Il s’agit bien souvent d’ingénieurs ou de professionnels du droit reconvertis ou lançant leur activité. On retrouve également les cabinets et directions juridiques cherchant à développer leurs propres outils numériques pour enclencher leur démarche de transformation digitale.

Et la French Legal Tech ?

L’écosystème des legaltech est de plus en plus dynamique en France, avec près de 230 startups répertoriées par l’Observatoire permanent de la Legaltech en France.

Par ailleurs, l’association France Digitale a créé en 2019 un groupe dédié à la LegalTech, regroupant 23 startups.

L’objectif de la French Legal Tech ? Apporter une expérience et une expertise en matière d’innovation juridique aux décideurs, afin de favoriser l’émergence de champions français de la LegalTech et de les armer face à la concurrence internationale.

Les startups constituant la French Legal Tech / © Le monde du droit

Quel avenir en France ?

En France, le potentiel de croissance est conséquent, mais le mouvement peine encore à s’imposer. Certaines instances encadrant les professions du droit, garants de l’éthique et des usages propres au métier, résistent encore à l’émergence de ces nouveaux acteurs. 

Cependant, les legaltech semblent avoir un avenir prometteur en axant leurs offres sur la digitalisation des services juridiques et la dématérialisation des procédures des entreprises, et les aidant à devenir plus agiles. Elles explorent désormais des outils innovants comme la blockchain ou la modélisation de données.

Des perspectives se dessinent et continuent d’évoluer :

  • l’intelligence artificielle vient appuyer les connaissances des juristes, améliore leur sens de l’anticipation des risques en venant éclairer leurs prises de décision ;
     
  • le machine learning assiste dans la veille juridique dans la détection des tendances et le gain de nouvelles connaissances concernant les faits ;
     
  • le progrès technologique rend les outils de recherche toujours plus perfectionnés avec la constitution de bases de données numériques, etc.

Ces technologies soutiennent et renforcent l’efficacité opérationnelle des professions et la capacité de travail des ressources juridiques. Favorisant ainsi une hausse de leur activité, ces tendances offrent un avenir prometteur aux legaltech, et tout particulièrement celles liées à la « justice prédictive » appuyée par l’IA.

Les legal tech à la Villette : un événement incontournable

Le grand salon français de la LegalTech est un événement phare organisé par Open Law et le Village de la Justice à la Villette à Paris, qui a lieu en novembre chaque année.

Ce lieu unique rassemble tous les acteurs français de la LegalTech, les professionnels et étudiants en droit, ainsi que les entrepreneurs, favorisant les échanges et les rencontres.

Au programme, des conférences autour des problématiques et solutions actuelles, ainsi que les perspectives du marché du droit, les modèles économiques, les technologies appliquées au droit et les innovations, mais aussi des temps de rencontres et des possibilités de formations.

Lors de l’édition 2019, le 4e Village de la LegalTech avait pour thème :

« Humain + Technologie = 3 ! Repenser l’articulation entre l’homme et la machine et humaniser la transformation numérique ».

ℹ️  Cette année, le salon se tient du 19 au 20 novembre 2020.

Autre grand événement : la Nuit des legaltech 2019 organisée par l’Incubateur du Barreau de Paris et le Barreau entrepreneurial s’est tenue pour la 3e édition en octobre. Des rencontres avec des professionnels et tables rondes se déroulent autour de thèmes d’actualité de la legaltech.

Panorama de la LegalTech : startups et éditeurs SaaS

Si l’écosystème de startups françaises est de plus en plus riche, voici quelques SaaS legaltech qui méritent d’être connus :

Et bien d’autres domaines !

La LegalTech : droit vers de nouveaux challenges ?

Qu’est-ce que les professions juridiques et les bénéficiaires de services juridiques ont réellement à gagner de ces innovations appliquées au droit ?

Si certaines limites sont encore rencontrées, le secteur est porteur et un avenir radieux se présente à lui.

Les legaltech gagnent à être considérées comme des opportunités : elles ne vont pas remplacer l’être humain, mais le compléter et l’assister dans ses tâches chronophages et fastidieuses. L’expertise reste humaine, les capacités sont augmentées grâce à la technologie.

Finalement, la dynamique devrait se situer dans le processus de « co-création » de ces outils numériques : les avancées technologiques se combinent aux usages et aux compétences métiers, les unes se perfectionnent, les autres s’enrichissent.

Cela implique pour le professionnel de se réinventer et s’approprier les innovations des Legal tech. Il pourra notamment développer son expertise sur des terrains non explorés par la robotisation.

Tout cela contribuera finalement à renforcer son rôle, afin de toujours offrir aux clients et justiciables des services de qualité.

Samantha Mur

Samantha Mur, Editorial & Content Manager

Diplômée de l'ISIT, grande école de management et de communication interculturels, Samantha a d'abord exercé son métier de "passeuse" de sens et de connaissances dans le monde de la traduction et à l'international. Comptant désormais plus de 5 ans d'expérience dans le marketing digital et la rédaction web SEO, elle se donne pour mission d'aider les entreprises BtoB engagées à faire rayonner leur cœur de métier. Avec son clavier pour allié et une bonne dose d'enthousiasme, elle leur propose du contenu impactant adressé à leur audience cible : articles de blog, sites internet, newsletters, e-books, pages de vente… Toujours curieuse, elle reste en veille sur les bonnes pratiques et les tendances SEO pour proposer aux clients un accompagnement éclairé et des stratégies pertinentes.

Un trait caractéristique ? Le goût de la punchline (humour soumis à la validation de ses collègues) !